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à menacer la Convention. Cette monomanie d’épuration absolue le poussait fatalement, quelque désintéressé qu’il pût être du pouvoir, à saisir une espèce de dictature judiciaire, une position de censeur et de grand juge, — et non seulement sur les actes politiques, mais sur les mœurs et les pensées.


Distinguons d’abord les époques.

Beaucoup d’hommes, qui, dans la réaction emportés par le torrent, devinrent extrêmement coupables, ne l’étaient nullement avant Thermidor. On ne pouvait les juger sur des faits à venir. Et dans ceux qui, dès l’époque où nous sommes arrivés, étaient déjà très coupables, tel fut un fripon, comme Chabot, tel, comme Carrier, une bête sauvage, un chien enragé, sans pourtant être /un scélérat. Ce mot n’implique pas seulement le crime, mais la perversité réfléchie, la corruption voulue de l’esprit et du cœur. Il y a eu peu d’hommes dans la Convention à qui on doive ce titre. Peut-être n’y en eut-il que trois : Rovère, Tallien, Fouché.

Rovère est, je crois, le seul membre de cette assemblée qui ait fait fortune. On verra par quels moyens.

On en peut dire autant de Tallien. Ce grand homme resta pauvre, les mains vides, sinon les mains nettes. Nous l’avons vu à Paris, traîner aux Champs-Elysées, à l’aumône de sa femme, alors princesse de Chimay.