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pierre, c’est la lutte qui éclata dans le Morbihan cuire le représentant Tréhouard et les agents de Carrier au sujet des prêtres. Carrier soutenait que trente mille Anglais allaient débarquer ; qu’en ce péril, il fallait s’assurer des prêtres, véritables chefs des populations. Tréhouard emprisonnait non les prêtres, mais les agents de Carrier,

Celui-ci, dans son vertige, son ivresse permanente, poussa la fureur au point de défendre d’obéir à Tréhouard, son égal, son collègue, un représentant du peuple ! Toute sa prudence l’avait abandonné. Non seulement il avait accepté un banquet public sur l’infâme bateau des noyades, non seulement il avait arbitrairement fermé la société populaire, mais il avait donné des preuves écrites contre lui, deux ordres à Tronjolly, président du tribunal, de faire mettre à mort des prisonniers sans jugement. Mot absolument inutile, dans un moment où tous les prisonniers périssaient à peu près sans jugement ; on reconnaissait seulement l’identité et l’on appliquait le décret qui frappait de mort tous les insurgés.

On ne pouvait toutefois procéder contre Carrier qu’avec beaucoup de prudence, par un moyen indirect. L’agent fut le petit Jullien, le fils de Jullien (de la Drôme), qui voyageait comme membre de la commission exécutive de l’instruction publique. Sous ce titre pacifique, il devait préparer la guerre, observer l’ennemi, encourager Nantes contre Carrier, Bordeaux contre Tallien.