Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 6.djvu/77

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Robespierre), mais de le faire mettre en pièces.

La chose eût eu lieu peut-être. Mais la salle, déjà si pleine, allait s’emplissant encore d’une invasion nouvelle, d’une foule animée de sentiments différents. Ces nouveaux venus, mêlés de sans-culottes aux bras nus et de gardes nationaux, avaient cela de commun que leurs visages brillaient d’une allégresse singulière.

La sombre Assemblée robespierrisée qui s’affaissait sur elle-même fut tout à coup, malgré l’heure avancée du soir (il était neuf heures), illuminée d’un joyeux rayon du matin.

Cette fois, c’était le peuple.

Contons cette belle histoire.

Nous avons dit comment les honnêtes maratistes avaient trouvé moyen de faire que Paris s’égorgeât. Ils avaient dénoncé au faubourg Saint-Antoine la section de la Butte-des-Moulins comme ayant pris la cocarde blanche, calomnie perfide qui contenait un appât ignoble. La section dénoncée était celle des marchands du Palais-Royal, du quartier Saint-Honoré, des orfèvres, horlogers, bijoutiers et joailliers. C’était à la fois un appel au meurtre et au pillage.

Le faubourg hésita un moment de croire les meneurs. Le procès-verbal des Quinze-Vingts témoigne que le peuple disait : « Nous voudrions du moins savoir pourquoi nous allons marcher… » La crédulité gagna néanmoins ; le faubourg descendit en armes, ému et très décidé à mettre les royalistes à la raison.