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dix pas du président ne put seulement entendre si le décret était mis aux voix ou était rendu. La salle était assiégée ; Meillan et Chiappe voulurent sortir, Pétion et Lasource voulaient rentrer, deux choses également impossibles.

La Convention ne pouvait siéger dans cette salle profanée qu’en votant des lois de force pour garder sa liberté. Rentrer sans défense, sans appui, sans garantie, c’était se livrer soi-même à de nouvelles violences et tenter le crime.

Un homme que rien n’effrayait, le Breton Lanjuinais, proclame, le 28 au matin, la nullité du décret. Nul cri ne peut le faire taire, nulle menace ; le boucher Legendre beuglait qu’il allait le jeter en bas de la tribune. Lanjuinais persista.

Il eut seulement le tort de juger trop du courage de tous par le sien. Il voulut l’appel nominal. Tous y consentirent bravement, mais tous ne votèrent pas de même. Leur faiblesse ou leur prudence révéla un grand changement dans l’esprit de l’Assemblée, une prostration inattendue de volonté et de force.

La Montagne eut presque la majorité. Elle qui, primitivement, n’avait pas cent voix, qui, vers le 15 mai, en eut cent cinquante, elle a pour elle, le 28, deux cent trente-huit voix !

La Gironde en obtient deux cent soixante-dix-neuf, c’est-à-dire qu’elle n’a plus que quarante et une voix de majorité.

Fonfrède sentit très bien que la commission des Douze, dont il était membre, rétablie par cette faible