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Clootz, en véritable Allemand, au lieu de se défendre, était en contemplation de cet étrange événement, en admiration de cet homme. « 11 parlait comme Mahomet, dit Clootz (dans la brochure qu’il publia)… Moi, je me disais, pendant qu’il débitait son roman, ce que le juif Orobio, prisonnier • de l’Inquisition, disait dans les cachots de Valladolid : « Est-ce « bien toi, Orobio ? — Mais non, je ne suis point « moi… »

Puis, sans aigreur ni rancune, s’adressant à sa patrie d’adoption, à cette pauvre France malade de cet étrange besoin de se faire et refaire des dieux, il lui dit ce mot de génie, dont elle a si peu profilé : « France ! guéris des individus ! »

Les Jacobins montrèrent qu’ils étaient une société bien disciplinée. Croyant ou ne croyant pas le roman de Robespierre, ils suivirent leur chef de file et, sans mot dire, rayèrent Clootz.

Camille avait fait pour Clootz ce qu’il avait fait pour les Girondins. L’enfant terrible leur avait tordu le cou, sauf à les pleurer ensuite. Tout le monde l’avait vu, la nuit du 30 octobre, pleurant, s’arrachant les cheveux. Et voilà pourquoi il avait tant besoin, le 13 décembre, de l’appui de Robespierre.

Il y croyait. Il se trompait. Robespierre le laissa froidement barbouiller dans son embarras, patauger dans son bégayement. Enfin, comme les femmes qui trouvent de la force dans leurs larmes et leur faiblesse, voilà tout à coup le bègue qui