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Plusieurs des condamnés n’y croyaient pas. Ils poussèrent des cris de malédiction.

Vergniaud, préparé sur son sort, demeurait impassible. Valazé se perça le cœur.

La scène fut si terrible, dit Chaumette, qui était présent, que les gendarmes restèrent littéralement paralysés. Les accusés, qui maudissaient leurs juges, auraient pu les poignarder, sans que rien y fît obstacle.

Mais le plus tragique accident eut lieu dans l’auditoire. Camille Desmoulins s’y trouvait. La sentence lui arracha un cri : « Ah ! malheureux ! c’est moi, c’est mon livre qui les a tués ! »

Il n’était pas loin de minuit. Le mort et les vivants redescendirent du tribunal dans les ténèbres de la Conciergerie.

D’une voix grave, ils marquaient la descente du funèbre escalier par le chant de la Marseillaise :

Contre nous de la tyrannie
Le couteau sanglant est levé.

Les autres prisonniers veillaient et attendaient. Ce mot convenu leur dit la sentence et que c’était fait de la Gironde. De tous les cachots ils répondirent par leurs cris et par leurs sanglots.

Eux, ils ne pleuraient pas. Un repas soigné, délicat, avait été envoyé par un ami pour le dernier banquet.

Deux prêtres voulaient les confesser. L’évêque et le marquis, Fauchet et Sillery, acceptèrent seuls.