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respirent le sentiment de l’héroïsme antique, le génie stoïcien. Celle-ci est de Vergniaud :

Potius mori quam fœdari.
La mort ! et non le crime.

Les faibles Mémoires de Brissot, écrits dans sa longue prison, témoignent du même caractère. On sent un cœur qui ne s’appuie que sur le droit et le devoir, sur le sentiment de son innocence, sur l’espoir du progrès et le futur bonheur des hommes. Croirait-on que l’infortuné, qui écrit sous la guillotine, ne s’occupe que d’une chose sur laquelle il revient toujours, l’esclavage des noirs ! Indifférent à ses fers, il ne sent peser sur lui que les fers du genre humain.

Les trois grands procès du tribunal révolutionnaire (ceux de la reine, des Girondins, de Danton) ont été conduits par le même homme, Herman, président du tribunal. C’était un homme d’Arras, compatriote et ami personnel de Robespierre. Dans les différentes listes que celui-ci a laissés d’hommes qui devaient arriver aux grands emplois, le premier nommé en tête est toujours Herman. Un homme de lettres distingué, d’Arras, qui vit encore dans un grand âge, m’a souvent conté qu’il l’avait connu. Herman était un homme de maintien posé, de parole douce, de figure sinistre ; il louchait extrêmement d’un œil et paraissait borgne.

Il n’y eut aucune hypocrisie dans le procès. Tout le monde vit de suite qu’il ne s’agissait que de tuer.