Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 6.djvu/442

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

poster dans le village de Doulers, sur la place de l’église, et là battit la charge derrière les Autrichiens ; leurs bataillons en perdirent contenance, et ils commençaient à se disperser. En 1837, on a retrouvé là les os du petit homme entre sept grenadiers hongrois.

Au moment où les nôtres, sous le torrent de la mitraille, hésitaient et flottaient, la cavalerie autrichienne arrive en flanc, l’infanterie qui avait cédé nous retombe sur les bras. Nous sommes rejetés en arrière.

Jourdan, après quatre heures d’efforts, voulait laisser le centre attaquer de côté. Carnot l’apprend, s’écrie : « Lâches ! » Jourdan alors fit comme Dampierre, il voulait se faire tuer. Une fois, deux fois, il recommença la lutte, amenant toujours ses hommes décimés au pied de ces hauteurs meurtrières, de ces canons féroces qui se jouaient à les balayer. Pas un ne refusait, pas un de ces jeunes gens n’hésita à marcher ; tous embrassaient la mort.

La nuit mit fin à cette affreuse exécution, qui eût toujours continué. Cobourg croyait avoir vaincu. Quels hommes n’eussent pas tombé de découragement ? et comment croire que ces soldats d’hier, dont plusieurs se voyaient pour la première fois à une telle fête, ne se tiendraient pas satisfaits ?

On vit alors toute la justesse du mot du maréchal de Saxe : « Une bataille perdue, c’est une bataille qu’on croit perdue. »