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Qui lèverait la réquisition ? Les communes ? les agents ministériels ? La chose n’eût pas été plus vite que pour les trois cent mille hommes votés en mars, qui n’avaient donné presque rien.

Danton ouvrit un avis noble et grand, de se fier à la France. Or, personne en ce moment ne la représentait plus fortement que ces braves fédérés des assemblées primaires, tout émus de Paris, exaltés au-dessus d’eux-mêmes et trempés au feu du 10 août. Robespierre ne voulait pas qu’on s’y fiât. Il avait dit aux Jacobins qu’on ne pouvait remettre de tels pouvoirs à des inconnus. Danton demanda au contraire que l’Assemblée leur donnât un pouvoir, une mission positive, sous la direction des représentants, qu’on les chargeât de la réquisition. « Par cela seul, dit-il, vous établirez dans le mouvement une unité sublime. » La chose fut votée en effet.

Les forges sur les places, des ateliers rapides qui faisaient mille fusils par jour, les cloches descendant de leurs tours pour prendre une voix plus sonore et lancer le tonnerre, les cercueils fondus pour les balles, les caves fouillées pour le salpêtre, la France arrachant ses entrailles pour en écraser l’ennemi. Tout cela composait le plus grand des spectacles.

Spectacle toutefois infiniment différent de celui de 1792, celui d’une action ferme, sérieuse et forte plutôt qu’enthousiaste. Le beau nom de 1792 qui fait son auréole au ciel, c’est celui du libre