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lées, humiliées, sacrifiées, se réveillent maintenant, se mettent sur leur séant, chantent de leur tombeau un chant de menaces et de mort… Ces voix, ce chant, ces menaces, tout cela s’appelle Chalier.

L’énorme apostume de maux a crevé par lui. Lyon recule effrayé, indigné de sa propre plaie ; il tuera celui qui l’a dévoilée.

Quand on chercha, au dernier jour, des moyens de le tuer, des preuves pour constater ses crimes, on ne put établir aucun acte, rien que des paroles. La seule trace imprimée qui reste de ses méfaits, c’est une suite de brochures relatives à une visite domiciliaire que Chalier aurait faite, au delà de ses pouvoirs, dans une maison qu’on soupçonnait de fabriquer de faux assignats.

On a prétendu qu’il avait dressé le plan d’un grand massacre, qu’un tribunal improvisé eût siégé sur le pont Morand, d’où l’on eût jeté les condamnés au Rhône. Une biographie girondine précise le nombre : douze mille. Les royalistes eux-mêmes ne poussent pas les choses si loin ; ils rougissent de ce chiffre insensé : ils disent vaguement un grand nombre.

Ses ennemis, pour le faire périr, furent réduits à l’invention la plus odieuse. On fabriqua une lettre d’un prétendu émigré qui remerciait Chalier de préparer les moyens de mettre la France à feu et à sang. Infâme et grossier mensonge par lequel on poussa le peuple à vouloir la mort de son défenseur.

Si Chalier et ses amis étaient coupables, au contraire,