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Cruelle douleur pour les hommes de Vincent-la-Montagne, pour la population nantaise, en général bonne et généreuse ! que ce pauvre étranger, qui avait si bien servi la ville au jour le plus glorieux de son histoire, eût quinze jours après péri sous l’épée d’un Nantais !…

Voilà un grave obstacle au rapprochement des partis, aux vues de Phelippeaux, qui arrive le 1er août. Le sang de Meuris fume encore.

L’administration girondine avait beaucoup à expier. Après le 29 juin, et lorsque le péril n’excusait plus sa dictature, elle l’avait continuée ; elle avait audacieusement déclaré, le 5 juillet, qu’elle


    de la guerre ». C’était le congédier. Les hommes qui le composaient, dont plusieurs étaient pères de famille, ne devaient pas, d’après leur âge, aller à la frontière. Au moins, désiraient-ils, en se retirant, recouvrer leurs effets perdus à Nort dans cet héroïque combat. On leur répondit sèchement : « Que, placés là par le général, ils avaient combattu comme tout corps armé pour la République, et non comme troupe nantaise ; qu’ils s’adressassent au commissaire des guerres. » Mais celui-ci ne voulut voir en eux qu’un corps nantais. On rapporta alors l’arrêté honteux et ingrat, on leur donna espoir de recevoir indemnité ; on promit de délibérer sur ce qu’il convenait de laisser aux hommes de ce bataillon auxquels il ne resterait aucun vêtement, si on les dépouillait (de ce qui était à la ville). — La société de Vincent-la-Montagne demandait que ces trente restés du bataillon eussent un supplément de solde de 15 sols, leurs femmes de 10 et leurs enfants de 5. « La Loi, répondit-on, y est contraire. Renvoyé aux représentants. » — Et, le même jour, on accordait 12, 000 francs d’indemnité à l’état-major de la garde nationale. — Si mal traité, le bataillon Meuris se décida à se dissoudre. Auparavant il eût voulu suspendre son drapeau aux voûtes de Saint-Pierre, la paroisse du ferblantier. On répondit que les églises ne servaient plus à ces usages. « Eh bien ! nous le mettrons, dirent-ils, à la société Vincent. » À quoi le procureur du département fit cette triste opposition : « Que ce drapeau, payé des deniers des administrés, n’appartenait qu’à eux et ne pouvait être déposé qu’au département. » Le général Canclaux rougit pour l’administration ; il intervint, obtint que pour honorer la mémoire de Meuris, membre de cette société, le drapeau du bataillon y serait déposé, et que l’administration en corps l’y accompagnerait. » (Archives du département de la Loire-Inférieure.)