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jeune et terrible de 1792, le défenseur des hommes de la Glacière, l’organisateur des bandes marseillaises du 10 août, semblait mort en 1793. À vingt-huit ans, déjà gras et lourd, il avait la lenteur d’un autre âge.

Les chaleurs de juillet furent extrêmes cette année. Les Girondins restent à Caen, se tiennent frais et font de petits vers. Caen les imite et ne fait rien. Elle donne trente hommes ; Vire en donne vingt. La petite bande, d’un millier d’hommes peut-être, avance jusqu’à Vernon, sous le lieutenant de Wimpfen, l’intrigant Puisaye, le célèbre agent royaliste. Parisiens et Normands, on se rencontre et l’on se parle. Puisaye, logé dans un château voisin et craignant les siens autant que l’ennemi, veut rompre la conversation, ordonne le combat. Tout s’enfuit aux premières décharges (13 juillet). Le reste ne fut qu’une promenade. Déjà le 8 le peuple de Caen avait protesté qu’il ne voulait pas de guerre.

En sa qualité de Normand, Lindet voulut être seul chargé de l’affaire ; il ferma le pays, renvoya les imbéciles et les maladroits qu’on lui envoyait, et prépara les matériaux d’un rapport contre les fédéralistes. En novembre, de retour au Comité, accablé de travaux immenses, il ne pouvait faire son rapport, mais il allait le faire toujours le mois prochain sans faute. Chaque fois que les Normands tombaient dans les mains de Fouquier Tinville, Lindet lui écrivait : « Tu ne peux procéder avant que j’aie fait mon rapport, qui est presque terminé. » Il gagna ainsi du