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l’appelait le roi Baco. Personne n’a eu plus d’aventures. Maire de Nantes, il sauva la ville, brava insolemment la Convention qui faillit le guillotiner. Commissaire à l’Ile-de-France, directeur de l’Opéra à Paris, définitivement il alla mourir à La Guadeloupe.

Les beaux registres de Nantes, admirablement conservés, restent pour témoigner à la gloire de cette vigoureuse dictature. On peut y voir la prévoyance universelle, l’activité infatigable, la forte décision, par lesquelles une seule ville intimida tout un monde. Ce gouvernement girondin fît précisément ce que les Montagnards auraient fait. Il convainquit les Vendéens qu’on ne mollirait jamais devant eux. Le 21 mars, on en eut la preuve. Le jury, qui venait de condamner des insurgés, fit savoir à l’administration que, si l’on exécutait, l’ennemi mettrait à mort cent soixante patriotes qu’il avait entre les mains : l’administration donna ordre d’exécuter sur-le-champ.

Avec tout cela, la résistance aurait été fort douteuse, si elle n’avait pris un caractère entièrement populaire, si la question ne se fût posée dans ses véritables termes, entre le Nantais et le Vendéen, l’ouvrier et le paysan, les souliers et les sabots.

Si la défense eût été toute militaire, Nantes était perdue. Si elle eût été bourgeoise seulement et par la garde nationale où dominaient les marchands, négociants, gens aisés, etc., Nantes était perdue.