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armée de soixante mille hommes ! L’Assemblée se rendormit… Au dernier appel de Nantes, au 22 juin, le Comité assura que le général Biron allait faire une diversion avec son armée de trente-cinq mille hommes. Or, la revue de cette armée, faite avec soin un mois après par deux envoyés montagnards, donna ce chiffre précis : neuf mille hommes, dont trois mille ne sont pas armés et trois mille sont des recrues qui arrivent et ne savent pas tenir un fusil. Biron, en réalité, n’avait que trois mille soldats. Cette misérable troupe était cachée dans Niort, plutôt que logée ; elle n’avait pas de pain en avance pour un jour. On comptait sur elle pour couvrir, non pas Nantes seulement, mais Paris ! On voulait que Biron, avec cette triste bande, traversât un quart de la France, passât sur le corps de la grande armée victorieuse des Vendéens et vînt se poster à Tours pour couvrir la capitale.

Tout ceci ne tenait pas seulement à la désorganisation générale, mais très spécialement à l’anarchie du ministère de la guerre. Il était depuis le 4 avril, dans les mains du Montagnard Bouchotte, patriote, mais très faible, et qui, par un effet naturel de la situation, était le jouet des clubs. Nul ministre n’existait qu’à condition de leur obéir, et Bouchotte avait pour premiers commis les principaux meneurs des sociétés populaires. La défiance maladive de ces sociétés, légitimée, il est vrai, par d’innombrables trahisons, leur faisait demander sans cesse d’autres généraux et dicter de nouveaux choix.