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venait se heurter aux deux immobiles. Couthon l’était de nature et de volonté ; le paralytique Auvergnat, dans sa douceur apparente, avait le poli, le froid, la dureté du silex de ses montagnes. Le chevalier de Saint-Just (comme l’appelle Desmoulins), dans son étonnante raideur jacobine, le cou Fortement serré d’une cravate empesée, ne tournait qu’en entier et tout à la fois, immobile en soi lors même qu’il se transportait d’un point à un autre. Certes dans le tourbillonnement d’une situation si confuse, on n’eût jamais pu trouver une image plus arrêtée d’un gouvernement immuable.

Cette fixité draconienne et terrible des deux hommes de Robespierre l’autorisait singulièrement. Si tels sont les disciples, disait-on, quel est donc le maitre ? La force de son autorité morale parut spécialement dans le coup qu’il frappa sur les Cordeliers, sur les enragés qui, à ce moment, s’étaient emparés de leur club. Ils avaient repris le rôle de Marat, ses thèses les plus violentes ; ils les mêlaient d’attaques contre la constitution, c’est-à-dire contre Robespierre.

Le 24, l’enragé des enragés, le Cordelier Jacques Roux, au nom de sa section, celle des Gravilliers, apporta à la barre une violente pétition, qu’il rendit plus violente en l’ornant d’additions improvisées. Tout n’était pas absurde dans cette furieuse remontrance à la Convention. Il reprochait à la Montagne de rester immobile « sur son immortel rocher » et de ne rien faire.