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masses n’auront ni le temps, ni la volonté, ni le pouvoir de se mettre à l’étude ; elles ne feront la loi que par leur silence.

Pour dire le vrai, les deux constitutions, la girondine et la jacobine, étaient ou peu applicables, ou très dangereuses.

La girondine est uniquement une machine de résistance contre l’autorité qui n’est pas encore et qui, avec elle, ne pourrait pas commencer ; elle n’est que liens, barrières, entraves de toutes sortes : si bien qu’une telle machine resterait immobile et ne bougerait. C’est la paralysie constituée. La constitution jacobine, toute démocratique qu’elle est, mène droit à la dictature. C’est son défaut, et c’était son mérite, au moment où elle fut faite et dans la crise terrible dont la dictature semblait le remède.

Elle fut lue le 10 et patiemment écoutée à la Convention. Mais, le soir même, on put voir qu’elle était peu acceptée, même des hommes du 2 juin. Ce fut précisément au sein de la société jacobine, à qui cette constitution remettait la France, qu’eut lieu la vive explosion des critiques.

Chabot, l’impudent, le cynique, qui plus que personne avait conspué la Gironde, fut presque aussi injurieux pour la constitution de Robespierre. Sans nulle attention au lieu, aux personnes, il dit crûment, sans embarras :

« Que la nouvelle constitution était un piège, qu’elle surprenait la dictature, qu’elle recréait un monstre