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Le même jour, Robespierre, ne voulant pas sans doute rester en arrière des Lyonnais et des Cordeliers, fit la même proposition dans la société des Jacobins, enchérissant et demandant qu’on salariât les patriotes qui assisteraient aux séances des sections.

Les Cordeliers, les Jacobins, entendaient-ils de même ce mot d’armée révolutionnaire ? Voulaient-ils la même chose ?

Nullement. Les Jacobins, Robespierre, voulaient seulement se créer une arme contre la Gironde, et, d’autre part, lever l’emprunt, les réquisitions par une voie expéditive, par le bras du peuple.

Mais les Chalier, les Gaillard, les Leclerc, de Lyon, les Gusman, les Jacques Roux, les Varlet, de Paris, les Cordeliers extrêmes, ceux que Marat appela enragés, imaginaient autrement la chose. Poètes furieux de la Révolution, ils voulaient de cette armée faire un apostolat, celui de la guillotine. L’armée révolutionnaire devait, selon eux, le bourreau en tête, courir toute la France, jugeant et exécutant, fanatisant par le vertige, convertissant par la terreur. Dès lors, le pain à bon marché ; les laboureurs tremblants ouvriraient tous leurs greniers, les riches leurs coffres. La France, mise en possession de toutes ses ressources, se trouverait tout à coup une incalculable force ; elle serait, sans difficulté, nourrie, défendue.

Les politiques de la Montagne étaient très opposés à cette idée sauvage. Robert Lindet, surtout, affir-