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lui le pamphlet terrible qui plus qu’aucune chose a mené les Girondins à la mort, son Histoire des Brissotins. Libelle affreux, roman cruel, où l’enfant colère joue sans voir qu’il joue avec la guillotine… Camille l’a pleuré, ce libelle, en octobre 1793, avec des larmes de sang… En vain. C’est la vertu du style : de tels crimes du génie, une fois commis, sont immortels ; l’auteur même n’y peut plus rien ; ils le poursuivent à jamais de leur implacable durée. Qu’il pleure tant qu’il voudra, il ne les effacera point.

L’Histoire des Brissotins, bien lue et suivie, n’est que la traduction ardente, inspirée, comique, des discours de Robespierre contre la Gironde. Pour le lien des idées, le fil logique, la recherche ingénieuse des plus faux rapprochements, l’œuvre bouffonne est calquée de très près sur l’œuvre sérieuse, et parfois servilement.

C’est ainsi que les Jacobins, exclus du Comité de salut public, écartèrent momentanément Fabre et Camille de l’influence de Danton, et fixèrent celui-ci dans les voies de la violence où l’imprudente attaque du Girondin Lasource l’avait jeté le 1er avril, et d’où, le 5 et depuis, il aurait voulu sortir.

Une seconde pétition, celle de la Halle-au-Blé, mit tout ceci en lumière. Menaçante et furieuse, elle mettait en cause non plus la Gironde, mais la Convention même, disant que la majorité était corrompue, qu’elle était ennemie du peuple, qu’en elle siégeait une ligue qui voulait vendre la France. Robespierre avait prévu qu’elle serait accusée, cette pétition