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rurales furent lancées sur des bourgades sans défense.

On forma à la hâte des bataillons de gardes nationales, et chaque bataillon prit le nom d’armée. Il y eut l’armée de Saint-Lambert, l’armée de Doué, celles de Bressuire, de Parthenay, Niort, Fontenay, Luçon, etc., je ne sais combien d’armées, et point de soldats.

Tout le monde était général ou officier supérieur. Les militaires émérites, sexagénaires, septuagénaires, qui restaient dans le pays, furent les généraux, le vieux Verteuil, le vieux Marcé, le vieux Wittinghof. Tous les autres officiers (négociants, rentiers, médecins) n’avaient jamais vu la guerre, jamais touché d’arme.

Les municipalités mettaient en réquisition quelques gardes nationales, population citadine de petits marchands, épiciers, bonnetiers, etc., qui ne savaient point charger un fusil. Le paysan, au contraire, était grand chasseur, appelé souvent aux chasses par les seigneurs mêmes (dit Mme  de La Rochejaquelein) ; depuis 1789, d’ailleurs, il chassait tout seul, sans autorisation et fort librement.

Les gardes nationaux, pères de famille, quittant à regret leurs boutiques, leurs enfants, leurs femmes éplorées, regardaient sans cesse vers la maison et l’heureux moment du retour. Devant l’ennemi surtout, la nostalgie leur venait. Au feu, ils se trouvaient avoir bien moins de bras que de jambes. Les retenir quinze jours loin de leurs maisons,