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pas moins que le mouvement fut spontané, un naïf élan du cœur de la France.

En huit ou dix jours, une grêle effroyable des plus sinistres nouvelles vient comme écraser Paris.

Le branle commence par Lyon ; on apprend qu’un grand mouvement vient d’y éclater. De tout temps, cette ville immense avait caché, favorisé la contre-révolution. Dans ces hautes maisons noires des quartiers industriels, entassées à dix étages, dans les longues côtes désertes qui montent à Fourvières, au fond des mystérieux repaires du monde ecclésiastique, les plus dangereux agents de l’émigration se cachaient à l’aise. Là, profitant commodément des relations du commerce, ils faisaient signe aux Alpes, à Paris, aux révoltés de Jalès, à la Bretagne, à la Vendée. Le coup du 21 janvier ne fît que les fortifier ; tout un peuple de prêtres réfractaires, de nobles déguisés, de religieuses exaltées, vint comme s’engouffrer dans Lyon, le travailla profondément de son fanatisme. Nul moyen de les saisir. Le grand Lyon industriel et commerçant, qui travaillait peu et ne vendait plus, était en connivence avec le Lyon aristocrate. Les marchands avaient été, se croyaient encore Girondins ; ils devenaient royalistes. Le parti républicain, qui diminuait chaque jour, était comme enragé de sa nullité et de son péril. Il avait la loi de son côté et ne pouvait rien. Deux ex-prêtres, disciples ardents de Marat, Laussel et Chalier, menaient la commune ; le vertige d’une situation si terrible les poussait à la folie ; seuls pour ainsi dire contre un