Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/360

Cette page a été validée par deux contributeurs.

solidaire des maux de cette pauvre ville, immolée si souvent pour nous. Elle périt deux fois, trois fois, pour avoir cru à la parole de nos rois, qui la mettaient en avant, comme un bouclier, sur le cœur de la France en péril, puis, blessée, déchirée, sanglante, la laissaient là pour périr. Hélas ! les Liégeois n’eurent guère davantage à se louer de la République. Son général, Dumouriez, n’avait pris aucune précaution pour les soutenir ; il ne se souciait pas même d’employer leur vaillante épée… Pourquoi ? Ils étaient trop Français.

Ce malheur et cette honte, ce premier revers de la France, cet abandon de nos amis, toutes ces mauvaises nouvelles, furent connus ici du 5 au 10 mars. Paris, il faut l’avouer, n’était pas insensible alors. Le contre-coup fut senti avec une extrême violence ; il y eut la honte d’abord et le rouge au front, puis le sang au cœur, avec une convulsion d’indignation patriotique.

Il n’y eut jamais de mouvement plus national que celui du dimanche 10 mars 1793, où les Girondins n’ont cru voir qu’une petite conspiration. Un reproche éternel pèserait sur la France et sur Paris, la conscience de la France, s’il n’avait ressenti la honte, la douleur d’un tel moment.

Ce qui se mêla d’artificiel à ce mouvement naturel, nous le dirons tout à l’heure. Comment les partis, dans leur étrange acharnement, dans leur patriotisme même, exploitèrent ce mouvement, nous l’expliquerons. Et, tout cela analysé, il n’en restera