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Par une manœuvre hardie, Latouche sut, malgré le vent contraire, se lancer jusque dans le port. Là, qui était en péril, de l’escadre ou de la ville ? On pouvait très bien en douter. L’escadre, placée sous le feu des batteries du rivage, pouvait être foudroyée, si elle foudroyait Naples. Naples eut peur ; ces femmes furieuses, si propres à la guerre de loin, commencent à s’évanouir ; le fameux marin Acton, si terrible contre la France, n’est pas rassuré. Latouche envoie simplement un soldat, un grenadier de la République, qui donne une heure au roi de Naples pour la reconnaître et recevoir un ministre français. On hésite. Pas une minute de plus ou le bombardement commence. On signe enfin, sans souffler mot.

Le ministre, débarqué au milieu de ces perfides, avait l’ordre d’exécuter une commission dangereuse : c’était d’envoyer un ministre à Rome, lequel, sans armée, sans flotte, par la force du nom français, l’intimidation de la République, prendrait position près du pape. Ce n’était pas sans grand péril qu’on pouvait affronter la populace de Rome, les barbares du Transtévère, les bouviers des marais pontins, comme leurs buffles, aveugles et féroces. Leurs maîtres pouvaient, d’un coup de sifflet, faire venir ces sauvages à Rome, les lancer contre les Français et les patriotes italiens.

L’homme qui affronta ce péril, et qui par son dévouement s’est placé bien haut dans l’histoire, était un révolutionnaire modéré ; Basville (ses ou-