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durer la guerre, sans qu’elle arrivât jamais à des résultats décisifs. Pour rien au monde, ils n’auraient voulu rendre forts les royalistes.

Cela dit, nous avons éclairci d’avance l’histoire de la coalition. Il nous reste à suivre, dans le détail, l’histoire de ces honnêtes gens.

M. Pitt riait très peu ; on assure cependant qu’il a ri jusqu’à trois fois. Il lui échappait, dans ce cas-là, des mots bas et triviaux, en désaccord singulier avec sa raideur ordinaire, mots sincères, passionnés, qui partaient du cœur et montraient le fond du fond. Ainsi, quand il sut l’incendie de Saint-Domingue et que les nègres égorgeaient tout : « Les Français pourront, dit-il, prendre maintenant leur café au caramel. » De même, apprenant plus tard que l’Espagne entrait dans la grande guerre, M. Pitt crut déjà tenir les colonies espagnoles : « On n’en mettra pas, dit-il, plus grand pot-au-feu, et cependant le bouillon en deviendra bien meilleur. » Le 21 janvier lui fut infiniment agréable ; il en tira l’augure d’une tyrannie violente où s’annulerait la France : « Elle n’aura fait, dit-il, que traverser la liberté. » Et encore : « Ce sera un blanc sur la carte de l’Europe. »

Il avait attendu froidement, patiemment, l’exécution de Louis XVI. En vain Fox et Sheridan, dans un noble élan de cœur (qui exprimait fidèlement la pensée nationale), obtinrent, à la fin de décembre, de la Chambre des Communes qu’elle invitât le gouvernement à intervenir auprès de la Convention. Pitt