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Fargeau. Cet honnête homme, dans la question de l’éducation, qui est celle même du cœur, s’était élevé au-dessus de lui-même par la bonté de sa nature. Vrai représentant de la Révolution en cette chose sainte, il n’était pas indigne de mourir pour elle. Le royalisme s’était bien adressé ; il l’avait frappée en ce cœur qui en contenait la résolution la plus généreuse, la plus humaine pensée.

Lepelletier, dans ce projet, peu littéraire de forme, admirable d’intention et nullement chimérique, établit parfaitement qu’il s’agit d’éducation, bien plus que d’instruction ; qu’il n’y a nul espoir d’égalité sans la fondation d’une éducation commune et nationale. La société doit donner cette éducation, — mais non la société seule (comme dans les Institutions de Lycurgue), la société avec l’aide et la surveillance des pères de famille, et toujours près des familles, dans la commune natale, de sorte que le père et la mère ne perdent jamais de vue l’enfant.

L’enfant, s’il est pauvre, sera nourri par l’école même[1]. On ne verra plus ce spectacle impie d’un enfant qui vient à l’école grelottant et affamé, et que l’école renvoie, lui refusant le pain de l’esprit parce qu’il n’a pas celui du corps, lui disant : « Tu es misérable ; eh bien, tu le seras toujours ; tu étais celui de tous qui avait le plus besoin de l’école ; va, on t’en exclut. »

  1. Lepelletier pourvoit à la dépense par trois moyens : 1o le travail des enfants déjà capables de travail ; 2o la pension que payeront les enfants de parents aisés ; 3o le complément donné par l’État. — Voir sur ce sujet, important entre tous, le dernier chapitre de mon livre, le Peuple.