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cet affreux vent de la mort, qui a nom : le fanatisme ?

Deux siècles à peine étaient écoulés depuis qu’une population tout entière, savamment travaillée des prêtres, était tombée un matin dans l’incroyable accès de rage qu’on appela la Saint-Barthélémy. À la fin même du dix-septième siècle, en pleine civilisation, n’avait-on pas vu aux Cévennes le phénomène effrayant d’un peuple tombant du haut mal et frappé d’épilepsie ? Au milieu d’une assemblée qui semblait paisible et pieuse, des hommes que vous auriez crus sages se tordaient tout à coup, criaient. Des femmes, les cheveux au vent, sautaient sur une pierre avec d’horribles clameurs et prêchaient l’armée ; les enfants prophétisaient. On a fait des livres entiers de leurs cris sauvages, religieusement recueillis.

Danton savait peu le passé. L’instinct du génie suppléait ; il sentait, pénétrait les choses, et toute histoire était en lui. Nous ne doutons nullement qu’il n’ait, dès cette époque, flairé la Vendée.

Des signes très mauvais, très bizarres, apparaissaient dans l’Ouest. La Vierge redoublait de miracles. On ne se battait pas depuis l’affaire de Châtillon ; on assassinait. Aux parties sauvages du Maine, aux environs de Laval et de Fougères, les frères Chouan, sabotiers, s’étaient jetés dans les bois. Les paysans fanatiques ou paresseux venaient les joindre et s’appelaient les chouans. Pour coup d’essai, ils avaient assassiné un juge de paix. Leur