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serrer qu’avec un éclat terrible. À lâcher la moindre chose, on risquait que tout s’emportât. Il y eût eu non pas seulement détente et descente : il y eût eu énervation subite, chute, défaite et déroute, abandon, sauve-qui-peut. La Montagne le sentait d’instinct ; elle reprochait, non sans cause, à la Gironde d’énerver la Révolution. Dans un mouvement de fureur où le patriotisme et la haine, la vengeance personnelle, étaient confusément mêlés, elle essaya de lui rendre le coup de Vergniaud.

Le 3 janvier, une redoutable machine lui fut lancée par la Montagne qui fît passer les Girondins de leur position de juges au rang d’accusés.

Un représentant estimé, sans importance politique, le militaire Gasparin, qui, comme Lepelletier Saint-Fargeau, eut le bonheur de sceller sa foi de son sang sous le poignard royaliste, Gasparin déclara à l’Assemblée que Boze, peintre du roi, chez lequel il avait logé l’été précédent, lui avait parlé d’un mémoire demandé par le château, écrit par les Girondins, signé de Vergniaud, Guadet, Gensonné. Dans ce mémoire, dit-il, ils exigeaient que le roi reprît le ministère girondin.

Gasparin savait le fait depuis juin et l’avait gardé cinq mois. Il le croyait apparemment d’une médiocre importance. S’il y eût vu un acte de trahison, n’eût-il pas dû le révéler au moment où la Convention, se faisant lire les papiers des Tuileries, examinait sévèrement les précédents politiques des hommes de la Législative ?