Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/196

Cette page a été validée par deux contributeurs.

le soutenait si peu. Il avait eu un moment populaire, et voilà tout. Il était insensé de le comparer à cette énorme et dangereuse puissance de la maison d’Orléans qui indépendamment de tant d’amitiés et de clientèles, par l’argent seul, par la force d’une fortune monstrueuse, la plus grande de l’Europe, restait une royauté.

Il était insensé de croire qu’on ferait une république tant qu’on aurait, au milieu, un roi de l’argent.

Royauté non disputée, bien plus effective et réelle que celle de Louis XVI, royauté sans charges ni devoirs, disposant de tous ses moyens sans contrôle, sans autre règle que l’utilité personnelle, la direction occulte d’une politique ténébreuse.

On sait comment se grossit cette fortune prodigieuse, comment, de proche en proche, l’or attirant l’or, la masse emportant la masse, une énorme boule de neige s’est formée, pour ainsi dire, jusqu’à faire une avalanche qui a emporté le trône.

Vaines prévoyances des hommes ! L’origine en fut la crainte qu’eurent les rois que les cadets, légitimes ou bâtards, ne recommençassent les guerres civiles pour la royauté. Ils crurent, en accumulant dans leurs mains la propriété, en soûlant leur avarice, les rendre moins ambitieux. La propriété, par laquelle on croyait les éloigner du trône, a été justement pour eux le chemin de la royauté.

Louis XIII a peur de son frère, et il l’étouffe de biens.