Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/157

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sentée habilement au point de vue légendaire par le parti royaliste, aurait un effet terrible dans l’opinion, que tout l’intérêt serait pour le coupable, la haine pour les juges, pour la France révolutionnaire. Les tyrans sont plus habiles ; ils ne montrent pas leurs victimes, ils les cachent, les enfouissent, les enterrent au donjon du Spielberg, aux puits de Venise. Dans sa prison tout ouverte, sur l’échafaud même, Louis XVI trônait encore. Qui savait la destinée, qui compatissait aux souffrances des martyrs de la liberté, que, pendant ce temps, Catherine faisait mourir en Sibérie ?

Il y avait bien des raisons de presser ce fatal procès qui créait tous les jours de nouveaux partisans au roi. Chose remarquable et peu attendue, ce fut la Montagne qui en suspendit le cours (jusqu’au 3 décembre).

Elle voulait, avant tout, et raisonnablement, il faut l’avouer, qu’on examinât sévèrement dans les papiers des Tuileries si, comme le bruit en courait, plusieurs des députés de la Législative, devenus membres de la Convention, n’y étaient pas compromis. Une commission fut chargée de cet examen, et la Gironde se plut à faire nommer rapporteur un des plus violents Montagnards, un vieux légiste d’Alsace, devenu l’élixir des Jacobins, le député Rulh.

Ces papiers excitaient la plus vive curiosité. C’était Louis XVI qui les avait cachés dans un mur des Tuileries. Le prince forgeron avait lui-même,