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de l’autre ; la Gironde se serait fiée à Dumouriez, la Montagne à Pache, au ministre jacobin.

Il avait traîné à la barre les hommes de Dumouriez, ces grandes puissances d’argent, qui croyaient qu’on achetait tout, au besoin l’impunité. On les éplucha de près. Cambon prétendait qu’un seul, un abbé gascon, avait eu l’industrie de se faire sur les subsistances de l’armée un gain modéré, honnête, de vingt et un mille francs par jour.

Dumouriez avait Danton près de lui, en Belgique, quand il reçut ce coup profond du décret du 15 décembre. Consterné, il le lui montre, lui demande ce qu’il en pense : « Ce que j’en pense, dit Danton, c’est que j’en suis l’auteur. »

C’est une gloire très durable pour Danton, véritablement peu commune, d’avoir, sinon fait, au moins soutenu la grande mesure, révolutionnaire que Cambon signait de son nom. Celui-ci, dans son âpreté d’économie, quelquefois mal entendue, n’avait que trop favorisé les ennemis de Danton en lui demandant un compte impossible. Le grand homme ne s’en souvint pas. C’est à son influence, sans nul doute, qu’on dut en grande partie l’accord de la Convention. Les dantonistes votant le décret du 15 décembre, aux applaudissements du peuple, les robespierristes n’auraient voté contre qu’en affrontant une extrême impopularité.

Un ordonnateur général fut envoyé pour veiller de près Dumouriez, et il fut choisi parmi ces exagérés que Robespierre avait fait attaquer en octobre