Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/106

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Ah ! doux génie de la France et de la Révolution… que ne puis-je briser ma plume et finir ici ce livre ! L’humanité dans la justice, ne flottant plus, mais fondée, la justice reine absolue, voilà le credo, la foi de ce nouvel âge, son symbole trois fois saint, plus que celui de Nicée.

« Le droit, a dit Mirabeau, est le souverain du monde. »

Robespierre : « Rien n’est juste que ce qui est honnête ; rien n’est utile que ce qui est juste. » (16 mai 1791.)

Et Condorcet (25 octobre 1791) : « C’est une erreur de croire que le salut public puisse commander une injustice. »

Même langage encore en 1792. — Et c’est alors que tous sont induits en tentation.

Le péril vient de tous côtés, la nécessité terrible, la menace de l’Europe, les trahisons du dedans. On parle moins de justice ; chacun se dit à voix basse : « Qui sait ? Nous allons périr, sans doute, si nous restons justes… Sauvons la France aujourd’hui, nous serons justes demain. »

La Gironde est tentée la première, et succombe la première.

La duplicité de la cour lui enseigne la duplicité. Elle joue le roi qui la joue, feint d’agir avec lui, le brise.

L’honneur est compromis ici. L’humanité reste encore, le respect de la vie humaine. Vient la seconde tentation, l’invasion et septembre ; que