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rangs de la Gironde, mais déjà, et de plus en plus, uni d’esprit à Danton. Ce qu’ils avaient de commun, c’était la facilité de caractère, l’amour de la vie, du plaisir ; tous deux étaient des hommes d’énergie, et, sous des formes âpres, violentes, nullement ennemis de l’humanité. Je ne crois pas que la proposition ait été inspirée par les Girondins, qui n’aimaient point les formes militaires. Les montagnards, en général, ne les aimaient pas davantage, Robespierre pas plus que Brissot. Je serais porté à croire que Lacroix exprimait la pensée de Danton.

Ce qui ferait supposer que cette mesure eût épargné le sang, c’est que la Commune la repoussa. Placée au centre même de la fermentation populaire, loin de calmer l’esprit de vengeance, elle allait toujours l’irritant. Elle n’osait dire nettement qu’elle craignait de trouver les fédérés militaires trop généreux pour les vaincus ; le 13, elle demanda seulement qu’au lieu de cour martiale, on créât un tribunal, formé en partie de fédérés, en partie de sectionnaires parisiens. — Le 15, elle s’enhardit, ne parla plus de fédérés, demanda que le jugement se fît par des commissaires pris dans chaque section. Ceux qu’on choisissait dans un tel moment ne pouvaient guère manquer d’être les plus violents des sections, et probablement les membres mêmes de la Commune. En d’autres termes, la Commune priait l’Assemblée de charger la Commune même de juger à mort tous ceux qu’on avait arrêtés et ceux qu’on arrêterait. Quelle limite dans cette route ? On ne pouvait le prévoir. Dès le 12, une