Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 4.djvu/489

Cette page a été validée par deux contributeurs.

humiliant coup de pied qui le sauva néanmoins et le mit d’aplomb : « Ne faisons pas, dit-il, des piédestaux à des pygmées ; ne donnons pas d’importance à des hommes que l’opinion saura remettre à leur place. Pour accuser un homme de viser à la dictature, il faudrait lui supposer un caractère, du génie, de l’audace, quelques grands succès politiques ou militaires. Qu’un grand général, par exemple, le front ceint de lauriers, revenant à la tête d’une armée victorieuse, vienne ici commander aux législateurs, insulter aux droits du peuple, il faudrait sans doute appeler vos regards et la sévérité des lois sur cette tête coupable. Mais que vous fassiez ce terrible honneur à ceux dont les couronnes civiques sont mêlées de cyprès, voilà ce que je ne puis concevoir ; ces hommes ont cessé d’être dangereux dans une république. On n’arrive pas ainsi au pouvoir suprême dans un pays qui doit élever à l’humanité le premier temple qu’elle ait eu en ce monde… »

Barère fut applaudi de tous ; il plut à la Montagne en sauvant Robespierre ; au centre, au côté droit, en l’humiliant ; à la Convention généralement, en donnant prétexte de ne rien faire, de se rassurer, de dormir. Deux membres pourtant réclamèrent : Barbaroux, qu’on ne voulut pas entendre, et Robespierre, cruellement mortifié, qui ne voulait nullement être sauvé ainsi. Barère avait proposé de donner à l’ordre du jour un considérant qui n’était point injurieux (Considérant que la Convention ne doit s’occuper que des intérêts publics). Robespierre