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Les vieilles haines, l’esprit d’isolement, aussi fort en 1792 qu’ils furent aux quinzième et seizième siècles, les ramenaient sous l’Autriche, comme ils les mirent alors sous la maison de Bourgogne, puis sous les Espagnols.

Comment tout cela était-il envisagé de la France ? Avait-elle impatience de profiter de cette impuissance radicale de la Belgique ? Rien de plus curieux à observer. Rien n’honore plus la France, la mémoire de nos pères, leur désintéressement, leur attachement aux principes, l’innocence, disons-le, la pureté de la Révolution.

Suivons attentivement la variation de nos hommes d’État, leurs scrupules. Il est évident qu’ils n’avaient rien de prémédité, rien de systématique.

Au premier moment, le cœur leur bat, on le voit bien. Ils voient la France déborder sur l’Europe et s’enivrent de sa grandeur. Au moment de Jemmapes, au moment de la réunion volontaire de la Savoie, Brissot écrit à Dumouriez ces paroles émues : « Ah ! mon cher, qu’est-ce que Richelieu, qu’est-ce qu’Alberoni, leurs projets tant vantés, comparés à ces soulèvements du globe que nous sommes appelés à faire !… Ne nous occupons plus d’alliance avec l’Angleterre ou la Prusse : Novus rerum nascitur ordo. Que rien ne nous arrête… Ce fantôme de l’illuminisme (la Prusse) ne sera pas pour vous le Sta, sol… La Révolution de Hollande n’en sera pas arrêtée. Une opinion se répand ici : « La République ne doit avoir de bornes que le Rhin. »