tinrent un instant près de la statue de Louis XV (où est maintenant l’obélisque), au pied de ce triste monument de la monarchie, si peu digne de leur dévouement et de leur fidélité.
Quelques-uns, qui eurent le bonheur de gagner les Champs-Élysées, furent cachés par de braves gens qui les travestirent et les firent évader le soir. En général, dans cette journée sanglante, il n’y eut point de milieu : les vaincus trouvèrent ou la mort, ou l’hospitalité la plus dévouée, généreuse jusqu’à l’héroïsme, et qui, au besoin, pour les sauver, elle-même affronta la mort. Et cela à part de toute opinion politique ; de violents révolutionnaires se conduisirent en ceci tout comme les royalistes.
Au château même, la foule, horriblement irritée par ses pertes énormes et par ce qu’elle croyait de la perfidie des Suisses, ne se montra pas aussi aveuglément barbare qu’on eût pu le supposer. Les dames de la reine, qu’on haïssait infiniment plus qu’aucun homme, comme les conseillères, les confidentes de l’Autrichienne, n’éprouvèrent nulle indignité. La princesse de Tarente avait fait ouvrir les portes et recommanda aux premiers qui entrèrent une très jeune demoiselle, Pauline de Tourzel. Quelques femmes, Mme Campan, entre autres, furent un moment saisies, menacées de la mort. Elles n’en eurent que la peur ; on les lâcha avec ce mot : « Coquines, la nation vous fait grâce. » Les vainqueurs les escortèrent eux-mêmes pour les faire