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bienfait l’exemption absolue d’impôt pour les classes pauvres, désira rester pauvre et que son clergé fût riche, rester maigre pour engraisser ses prêtres. Il vota contre sa liberté, contre sa subsistance et son pain, que la France lui mettait à la bouche.

La population fanatique, qui, en octobre, priait à Sainte-Gudule et faisait à genoux le chemin du Saint-Sacrement « pour l’anéantissement de la maison d’Autriche », dès la fin de novembre, elle priait contre la France, hurlait autour du club et menaçait de mort les patriotes belges. Dumouriez s’épuisait à tâcher de leur faire comprendre leur intérêt réel. Il y eut, le 27, une première tentative de soulèvement contre lui. On sentait bien qu’il hésiterait à employer la force. Il essaya les remontrances paternelles et fut indignement sifflé.

Les fourbes qui menaient ces populations aveugles et ne voulaient rien autre chose que les ramener au joug ne manquaient pas, dans leurs pamphlets, d’attester la souveraineté du peuple. « Le peuple belge n’est-il pas souverain, un souverain indépendant et libre ? » — Ils réclamaient pour lui la liberté du suicide.

Le Peuple ? Mais à quoi reconnaître qu’il y eût un peuple, lorsque ces confus assemblages de villes, qui n’ont même jamais pu sérieusement se grouper en province, n’en venaient pas à donner le moindre signe d’union, au moins fédérative ? La trahison du général français était pour eux une occasion unique, inespérée, de se coaliser, et ils n’en pouvaient profiter.