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ser qu’on la renouvelât elle-même par des élections régulières.

L’odieux de cette conduite s’étendait aux amis de la Commune, à son défenseur Danton. Lui aussi ne voulait pas ou ne pouvait rendre ses comptes. Il était convenu entre les ministres que, pour les dépenses secrètes, ils se les expliqueraient les uns aux autres et se rendraient compte mutuellement. C’est ce que Danton allégua, dans la Convention, quand on le pressa sur ce point. Mais Roland, impitoyable dans ce moment décisif, déclara que non seulement nul compte de ce genre ne lui était connu, mais qu’il en avait inutilement cherché les traces sur les registres du conseil.

Danton donna une explication fort spécieuse. Il avoua qu’il n’avait point de quittances régulières, mais qu’au moment du péril l’Assemblée lui avait dit : « Allez, n’épargnez rien, prodiguez l’argent. — Il est telle dépense, dit-il encore, qu’on ne peut trop expliquer, telle mission révolutionnaire qui demande de grands sacrifices, tel émissaire qu’il serait injuste et impolitique de faire connaître… »

Cette réponse parut à la Gironde une défaite, et pourtant elle était sérieuse. Ce qui était mystère alors est dans la lumière aujourd’hui. Danton, en réalité, tenait dans la main toutes les grandes affaires secrètes qui intéressaient le salut de la France, ces affaires de diplomatie et de police où un homme politique est obligé de jeter l’argent et ne peut compter.