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Les Girondins n’eurent point cette pénétration, ni ces ménagements justes et politiques. Il eut beau avancer vers eux, ils se défièrent de lui. Pour se faire croire, il eût fallu qu’il se compromît, se perdît du côté de la Montagne, désarmât, devînt inutile.

Longtemps après, un jeune représentant de la gauche insistant auprès de lui, lui disant qu’il y aurait moyen de ramener le côté droit, Danton lui dit d’un air sombre : « Ils n’ont pas de confiance. » — Et le jeune homme, insistant, n’en tira pas autre chose : « Non, répéta Danton, ils n’ont pas de confiance. »

Tragique réponse et trop vraie !… Elle contient à elle seule l’histoire de la Convention, sa funèbre destinée, et celle-ci à son tour contient en puissance la triste iliade de tous nos malheurs, la liberté compromise, et pour longtemps, tant d’arguments terribles que la Révolution a fournis contre elle-même. Tout fut dans ce fatal divorce : « Ils n’ont pas de confiance. » Je n’ai pu tracer ces sombres paroles, sans que tous les maux de la patrie ne revinssent à mon souvenir et ne me rentrassent au cœur, amassés d’un même flot…

Accueilli dans la Convention de regards hostiles et de mots amers, harcelé par les journaux, Danton fit la guerre malgré lui. Chassé, poussé, acculé, le sanglier riposta par d’obliques coups de défense qui donnaient la mort. Le premier coup qu’il rendit, ce fut au 29 septembre, lorsque Roland, nommé