et envoyée par toute la France pour étendre à toutes les villes le massacre de Paris. Un frémissement d’indignation parcourut l’Assemblée ; mais les murmures devinrent des cris, des clameurs de réprobation, lorsqu’un député tira de sa poche un article de Marat, daté du 21 septembre et publié le 22. Il y déclarait qu’il n’y avait rien à espérer de la Convention, qu’il fallait encore une insurrection ; qu’autrement on devait s’attendre à cinquante ans d’anarchie et qu’on n’en sortirait que par la dictature. Il finissait par ces mots cruellement significatifs, au lendemain de septembre : « Oh ! peuple babillard, si tu savais agir ! »
Pris ainsi dans ce cri de meurtre et comme la main dans le sang, Marat devait être atterré. Il en fut tout autrement. Lui qui toujours s’était caché, il parut heureux de se montrer au grand jour ; il accepta hardiment la lumière et le défi. La créature de ténèbres vint s’étaler au soleil, souriant de sa vaste bouche, ayant l’air de dire à ceux qui (comme Madame Roland) doutaient si Marat était un être réel : « Vous en doutiez ? Le voici. »
Sa seule présence à la tribune souleva tout le monde ; elle en paraissait souillée. Cette figure large et basse qui dépassait à peine de la tête et de la poitrine et s’étalait en largeur, ces mains grasses, épaisses, qu’il plaquait sur la tribune, ces yeux proéminents, ne donnaient point l’idée de l’homme, mais bien plutôt du crapaud… « À bas ! à bas ! » criait-on. Lui, sans se déconcerter : « J’ai dans cette Assem-