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choix aristocratiques, ce qui tint à ce que, dans une pensée démocratique, on appela les domestiques au vote. À cela près, les conventionnels étaient de petits bourgeois, médecins, avocats, professeurs, gens de lettres, marchands, etc. Il n’y avait qu’un ouvrier de Reims, un cardeur de laine. Ces bourgeois étaient de bons citoyens, amis du bien, amis de l’humanité et des intérêts populaires, bien moins violents qu’on ne l’a dit.

Sur sept cent quarante-cinq membres que comptait la Convention, cinq cents n’étaient ni Girondins ni Montagnards ; la Gironde leur inspirait de l’envie, la Montagne de l’horreur. Il était évident que la majorité, la force, seraient à ceux qui sauraient entraîner cette masse flottante de cinq cents représentants, qui, à considérer le nombre, n’étaient guère moins que la Convention elle-même. Leur modération naturelle et la terreur de septembre les faisaient incliner à droite ; mais une terreur plus grande pouvait les faire voter à gauche.

Leurs préjugés contre Paris ne furent pas diminués par les premières impressions qu’ils recueillirent dans la foule, le jour même où, réunis, ils traversèrent les rues en corps. Ils entendaient dire sur leur passage cette parole étrange et naïve[1] : « Pourquoi donc faire venir tant de gens pour gouverner la France ? N’y en a-t-il pas assez à Paris ! » Ce mot, échappé au hasard de quelques bouches imbé-

  1. M. Daunou m’a dit l’avoir entendu lui-même.