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lité contractante, celle qui résulte d’un libre accord entre le seigneur et le paysan ; vous ne pouvez secouer le joug de cette féodalité consentie qu’en indemnisant le seigneur. — Le paysan a la tête dure ; il s’obstina à ne pas comprendre, ne dit mot, alla son chemin. Un contrat entre le fort et le faible, entre celui qui était tout et celui qui n’était rien ! un accord consenti librement par un homme non libre, par un homme qui n’avait pas même son corps, qui n’était pas une personne, qui légalement n’existait pas ! c’étaient choses bonnes à plaider entre légistes, mais difficiles à soutenir entre hommes de bon sens. La peine infligée au système féodal et l’expiation de sa tyrannie, c’est qu’au jour du jugement, tout acte de lui parut tyrannique, et s’il avait parfois respecté la liberté, demandé consentement, contracté librement, il ne se trouva personne pour le croire. À tout acte qu’il alléguait, libre ou non, on riait, on disait : Féodal, et tout était dit.

L’Assemblée constituante et ses légistes avaient tranché légèrement une question très grave d’antiquité et de droit. Ils avaient supposé que le seigneur possédait originairement toute terre, et que, pour tel service, pour telle redevance, il avait daigné faire part de sa terre à celui-ci, à celui-là. Ils voyaient l’origine de toute propriété dans les concessions de fiefs. Ils niaient les origines libres de la propriété, ignoraient les aïeux. Qui ne sait que les choses se passèrent, non moins souvent, en sens inverse ? que ce fut au contraire le propriétaire libre, le faible,