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profonde douleur des femmes, la sombre indignation des hommes. Ils en tirèrent un grand espoir et entreprirent de le communiquer au roi. Dans une foule de lettres qu’ils lui écrivent ou lui font écrire au printemps de 1792, ils l’encouragent à tenir ferme, à n’avoir pas peur de la Révolution, à la paralyser par l’obstacle constitutionnel, le veto. On lui prêche la résistance sur tous les tons, par des arguments variés et sous des noms de personnes diverses. Tantôt ce sont des lettres d’évêques, écrites en phrases de Bossuet : « Sire, vous êtes le roi très chrétien… Rappelez-vous vos ancêtres… Qu’aurait fait saint Louis ? » etc. Tantôt des lettres écrites par des religieuses ou en leur nom, des lettres gémissantes. Ces plaintives colombes, arrachées de leur nid, demandent au roi la faculté d’y rester, d’y mourir. Autrement dit, elles veulent que le roi arrête l’exécution des lois relatives à la vente des biens ecclésiastiques. Celles de Rennes avouent que la municipalité leur offre une autre maison ; mais ce n’est pas la leur, et elles n’en voudront jamais d’autre.

Les lettres les plus hardies, les plus curieuses, sont celles des prêtres : « Sire, vous êtes un homme pieux, nous ne l’ignorons pas. Vous ferez ce que vous pourrez… Mais enfin, sachez-le, le peuple est las de la Révolution. Son esprit est changé, la ferveur lui est revenue ; les sacrements sont fréquentés. Aux chansons ont succédé les cantiques… Le peuple est avec nous… »

Une lettre terrible en ce genre, qui dut tromper le