Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 4.djvu/286

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Et en même temps commence, dans les bois et les brouillards de l’Ouest, la vaste guerre des ténèbres. Aux landes du Morbihan, le long des îles brumeuses, aux sombres fourrés du Maine, dans l’humide labyrinthe du Bocage vendéen, apparaissent, sous formes douteuses, les premiers essais de la guerre civile. Une maison a été brûlée, un patriote assassiné, et là-bas un autre encore. Par qui ? Nul n’osera le dire. La guerre, qui, dans un an, amènera une grande armée sous les murs de Nantes, s’essaye encore timidement, au crépuscule ou la nuit.

Ce sifflement, cette plainte, sont-ils la voix du hibou ou de la chouette ? Vous diriez l’oiseau de mort… Oui, et de la haie voisine brille et part un coup de feu.

C’est une guerre de fantômes, d’insaisissables esprits. Tout est obscur, incertain. Les rapports les plus contradictoires circulent dans le public. Les enquêtes n’apprennent rien. Après quelque fait tragique, les commissaires envoyés arrivent, inattendus, dans la paroisse, et tout est paisible ; le paysan est au travail, la femme est sur sa porte, au milieu de ses enfants, assise et qui file ; au col son grand chapelet. Le seigneur ? On le trouve à table ; il invite les commissaires ; ceux-ci se retirent charmés. Les meurtres et les incendies recommencent le lendemain.

Où donc pouvons-nous saisir le fuyant génie de la guerre civile ?

Regardons. Je ne vois rien, sinon là-bas, sur la