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maître de l’interdire à Dumouriez. Celui-ci, par une fausse attaque, lui fit repasser la Meuse, lui escamota, pour ainsi dire, la position disputée, occupa les défilés à la barbe de l’Autrichien ébahi (7 septembre).

Lui seul, il l’assure, soutint, contre tous, qu’il fallait défendre cette ligne de l’Argonne, qui sépare le riche pays de Metz, Toul et Verdun, de la Champagne pouilleuse. On insistait en vain pour qu’il se retirât vers Châlons et qu’il défendît la ligne de la Marne. Il put mépriser les murmures ; tout autre général eût été forcé d’y céder. Mais Dumouriez avait pour lui, près de lui, pendant la campagne, pour répondre de lui et le soutenir, Westermann, c’est-à-dire Danton.

Il eut seulement le tort d’écrire à Paris : « Que l’Argonne serait les Thermopyles de la France, qu’il les défendrait et serait plus heureux que Léonidas. » Le Léonidas français faillit périr comme l’autre. Il avoue lui-même, avec une franchise qui n’appartient qu’aux hommes supérieurs, qu’il garda mal un des passages de l’Argonne et qu’il se laissa tourner (13 septembre).

Deux de ses lieutenants étaient en pleine retraite, et il ne savait plus lui-même où ils étaient. Il se vit un moment réduit à quinze mille hommes, perdu sans ressources, si les Autrichiens qui avaient forcé les défilés profitaient de leurs avantages. Ils perdirent encore du temps. Au milieu d’une nuit pluvieuse, Dumouriez, à petit bruit, exécuta sa retraite, et il