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les vrais Suisses avaient les cheveux tout simplement coupés en rond ; leurs chemises étaient grossières. La présence de ces faux Suisses dans les rangs des vrais étonna sans doute ceux-ci et ne laissa pas de les inquiéter. Ils durent mieux voir qu’il s’agissait de guerre civile, de querelles entre Français, où les étrangers ne pouvaient se mêler qu’avec précaution. Le vieux colonel suisse, Affry, s’abstint positivement et ne voulut pas tirer. Les autres promirent seulement de faire ce que ferait la garde nationale, pas davantage, ni moins.

Celle-ci, à plus forte raison, avait l’esprit traversé des mêmes pensées. Quoiqu’elle fût toute tirée des trois bataillons royalistes et encore soigneusement triée dans ces bataillons, quoique nul garde national n’eût répondu au suprême appel de cette nuit sans avoir une opinion décidée pour le roi, ces défenseurs bourgeois du château ne voyaient pas sans jalousie les nobles cavaliers qu’on avait appelés à partager le péril, et à qui, sans nul doute, la cour eût attribué tout l’honneur de la défense. Ces gentilshommes étaient généralement les mêmes chevaliers du poignard que la garde nationale, sous le règne de La Fayette, avait chassés du château, en avril 1790. Ils n’acceptèrent pas moins le péril et vinrent défendre le roi au 10 août 1792. Péril réel, en plus d’un sens. Ils n’arrivaient au château qu’à travers une population très hostile, en simple habit noir, sans armes ostensibles, avec des poignards ou des pistolets. Et là ils trouvaient