Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 4.djvu/202

Cette page a été validée par deux contributeurs.

en emmenèrent même pour s’en amuser ailleurs.

Ces effroyables sauvages ne quittèrent la Salpêtrière que pour aller aider au massacre de Bicêtre. On y tua cent soixante-six personnes, sans distinction de classes, des pauvres, des fous, deux chapelains, l’économe, des commis aux écritures. L’immensité du local donnait aux victimes bien des moyens de lutter, d’ajourner du moins leur mort. Les moyens les plus barbares y furent employés, le fer, le feu, les noyades, jusqu’à la mitraille.

On a retrouvé (en 1840), au funèbre écrou de Bicêtre (voir le livre de M. Maurice), le fait le plus exécrable des massacres de septembre, enfoui, ignoré jusqu’ici : c’est que, non contents des orphelines de la Salpêtrière, ils pénétrèrent aussi à la Correction de Bicêtre, où étaient cinquante-cinq petits garçons. Ces enfants étaient, nous l’avons dit, la plupart bien peu coupables : plusieurs n’avaient été mis là que pour dompter leur caractère par les mauvais traitements. Couverts de coups, de cicatrices, continuellement fouettés, aux moindres causes et sans cause, ils auraient brisé les cœurs les plus durs. Il fallait les tirer de là, leur rendre l’air et le soleil, les panser et les soigner, les remettre aux mains des femmes, leur donner des mères, Leur mal et leur vice, à la plupart, tenaient à cela, qu’ils n’avaient pas eu de mères. Septembre, pour mère et nourrice, leur donna la mort, — affranchit leur jeune âme de ce pauvre petit corps, qui avait déjà tant souffert. Il y en eut trente-trois de tués. Plusieurs de ceux qui