Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 4.djvu/184

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Déjà, la veille, à la Commune, il avait eu le bonheur de sauver Madame de Staël. Son titre d’ambassadrice de Suède ne suffisait pas à la protéger ; Manuel réussit en montrant qu’elle était enceinte.

Pour revenir à la Force, Pétion harangua les massacreurs, s’en fit écouter ; il parla très sagement et crut les avoir convertis à l’humanité, à la philosophie ; il parvint même à les faire partir, les fit sortir par une porte. Lui parti, ils rentrèrent par l’autre et continuèrent de plus belle.

Le quartier Saint-Antoine et le faubourg restaient étrangers à l’affaire. Un moment pourtant on put croire qu’ils sortiraient de leur inaction, que la masse honnête se déciderait à chasser les assassins. Quelques hommes allèrent chercher un canon à la section (je parle d’après un témoin oculaire) et se mirent à le traîner vers la Force. Parvenus bien près de l’église, ils virent qu’on ne les suivait pas et laissèrent là leur canon.

Les massacreurs continuèrent. La victime qu’ils attendaient, désiraient, était Mme de Lamballe. Ils avaient bien voulu épargner deux ou trois valets de chambre du roi, du dauphin, reconnaissant que le dévouement obligé d’un serviteur ne peut être un crime ; mais Mme de Lamballe, ils la considéraient comme la principale conseillère de l’Autrichienne, sa confidente, son amie, et quelque chose de plus. Une curiosité obscène et féroce se mêlait à la haine que son nom seul excitait et faisait désirer sa mort.

Ils se trompaient certainement pour l’influence