Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 4.djvu/17

Cette page a été validée par deux contributeurs.

pouvait, au besoin, faire parler les deux premières autorités de la ville, le département, la mairie. Pétion, mandé vers onze heures au château, n’avait osé refuser de s’y rendre. Sa première conduite dans les jours précédents avait été fort étrange. Le 4, on l’a vu, il avait dénoncé la guerre à la royauté. Le 8, il avait paru s’intéresser encore à cette royauté, avait averti le département qu’il ne pouvait répondre de la sûreté du château. Le 9, il avait demandé qu’un camp fût établi au Carrousel, pour protéger les Tuileries. Ce camp de gardes nationaux, en couvrant la place, l’eût-il défendue ? ou, tout au contraire, rendu la défense impossible ? C’est ce qu’on ne peut pas trop dire. Le château n’eût tiré de ses fenêtres qu’en tirant sur ses défenseurs. Le 9 encore, Pétion, soit pour endormir la cour, soit par lassitude, par conviction que le mouvement n’aurait pas lieu, demanda au département la somme de vingt mille francs pour renvoyer les Marseillais, qui, dans leur découragement, voulaient s’éloigner de Paris.

Pétion entra donc, bon gré mal gré, dans la fosse aux lions. Jamais le château n’avait eu un aspect si sombre. Sans parler d’une masse de troupes de toutes armes, de l’artillerie formidable qui remplissait les cours, il lui fallut passer à travers une haie d’officiers français ou suisses, qui le regardaient d’un œil peu amical. Pour les gardes nationaux, leur attitude n’était nullement plus rassurante ; ceux qui s’y trouvaient étaient pris uniquement