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tres, les ministres à l’Assemblée. Cette hiérarchie, qui était dans la loi même et dans la raison, aux temps ordinaires, pouvait-elle être obstinément maintenue dans un pareil jour ? Ne fallait-il pas surseoir aux délibérations, aux paroles, lorsque les décisions diverses, selon l’occurrence des cas, auraient besoin d’être immédiates, rapides comme la pensée ? On ne pouvait laisser flotter le pouvoir, dans la sphère supérieure, éloignée de l’action, aux mains molles et lentes d’une grave Assemblée qui parlait, parlait et perdait le temps. On ne pouvait le laisser à la discrétion de la Commune, aveugle et furieuse, dissoute d’ailleurs en réalité et qui n’était plus qu’un chaos sanglant sous le souffle de Marat. Le plus simple bon sens disait que le pouvoir laissé, en haut ou en bas, aux deux corps délibérants, l’Assemblée ou le conseil de la Commune, ne serait plus le pouvoir. Il fallait le fixer là où il pouvait être énergique, où le plaçait d’ailleurs la nature même des choses, aux mains des ministres ; il fallait se fier à eux, dans cette grande circonstance, les prier, les sommer d’être forts ; sinon tout allait périr.

Le ministère lui-même, malheureusement, n’avait aucune unité de pensées ni de volontés. Il eût fallu qu’il s’accordât, qu’il vînt unanimement demander la dictature, qu’il l’exerçât sous l’inspection des commissaires de l’Assemblée.

Le ministère avait deux têtes, Roland et Danton.

Danton vint, avant deux heures, tâter une dernière fois les dispositions de l’Assemblée.