nulle part, mais qui est plus que vraisemblable, ces braves durent être appuyés d’autres braves, bien plus animés encore, de la masse des Gardes-françaises, devenus sous La Fayette garde nationale soldée, puis licenciés récemment avec autant d’imprudence que d’ingratitude. Nous y reviendrons.
Tout cela fut enlevé d’un même mouvement d’indignation, de patriotisme. Il n’y eut aucun préparatif, aucun chef, quoi qu’on ait dit[1]. Bien loin qu’aucun individu eût assez d’influence en ce moment pour soulever le peuple, les clubs mêmes y firent très peu. Ils étaient moins fréquentés au mois d’août qu’à une autre époque de l’année. On se lassait aussi de leur parlage éternel ; on sentait qu’il fallait des actes. Leurs plus grands orateurs parlaient dans le désert.
Ce qui brusqua l’insurrection et la fit éclater à un jour peu ordinaire, un vendredi, c’est que les Marseillais, sans ressource à Paris, voulaient combattre ou partir. Le tocsin paraît avoir sonné d’abord aux Cordeliers, où ils logeaient. Le fau-
- ↑ Il faut le répéter. Il n’y eut aucun auteur du 10 août, nul que l’indignation publique, l’irritation d’une longue misère, le sentiment que l’étranger approchait et que la France était trahie. Nul homme alors, ni Danton, ni Santerre, ni personne, n’avait assez d’ascendant pour décider un tel mouvement. Il n’y eut aucun général de l’insurrection.
Les seuls qui aient vu le Prussien Westermann en tête de la colonne, ce sont ceux qui n’y étaient pas. Il n’y eut rien de préparé. Excepté les cinq cents fédérés marseillais qui se firent livrer des cartouches, les assaillants n’avaient presque aucune munition ; ils furent tout d’abord réduits à celles qu’ils trouvèrent dans le Carrousel sur les cadavres des Suisses. Quelques gardes nationaux avaient par bonheur gardé celles que La Fayette fit distribuer un an auparavant au Champ de Mars, le 17 juillet 1791.