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daient ensuite à rester en armes « jusqu’à ce que la constitution fût exécutée ».

L’attitude du peuple, au nom duquel on venait de lire cette adresse violente, y répondait peu ; il était bruyant, mais joyeux, bien plutôt que menaçant. Le temps était admirable, un de ces jours où le ciel, par l’éclat de la lumière, la douceur de la température, donne espoir à tous et semble se charger de consoler les plus profondes misères. Celle de Paris allait croissant ; malgré le bon marché du pain, tout travail ayant cessé, tout commerce ou à peu près, il y avait nombre de personnes littéralement affamées. Tout cela cependant, ouvriers sans ouvrage, pauvres ménages dénués, mères chargées d’enfants, cette masse immense d’infortunes s’était soulevée avant jour de la paille ou du grabat, avait quitté les greniers des faubourgs, sur le vague espoir de trouver dans cette journée quelque remède à leurs maux. Sans bien connaître à fond la situation, ils savaient en général que l’obstacle à tout changement était le veto du roi, sa volonté négative, sans doute inspirée de la reine. Il fallait vaincre cet obstacle, amener à la raison M. et Mme Veto. Comment et par quels moyens ? Ils n’y avaient pas trop pensé ; sauf un assez petit nombre de meneurs, la foule n’avait nulle intention de forcer l’entrée du château.

Que voulaient-ils vraiment ? Aller. Ils voulaient marcher ensemble, crier ensemble, oublier un jour leurs misères, faire ensemble par ce beau temps une grande promenade civique. La faveur seule d’être